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Article
paru dans TÉLÉRAMA n°3200,
le 11 mai 2011.
Nathalie Baye, Côté
courts
Par
Guillemette Odicino
Garce,
rebelle, bohème..., l'actrice déroule
les facettes de son talent dans cinq courts métrages
qu'elle a inspirés à de jeunes réalisateurs.
Cette année Nathalie Baye sera à
Cannes avec... cinq films. Ou plus exactement
un programme intitulé 5 fois
Nathalie Baye, réalisé
pour La collection « Écrire pour...
» de Canal+, qui sera projeté
le 17 mai dans le cadre de la Semaine de la critique
et diffusé le même jour sur la chaîne.
Cinq courts métrages pour cinq visages
différents de l'actrice, et pas seulement
à cause des perruques... La comédienne
y incarne, par ordre d'apparition, une somnambule
rebelle, une mère bohème, une garce
humanitaire, une réalisatrice cruelle et
une actrice qui tombe le masque. C'est la première
fois qu'une star française accepte de se
prêter au jeu d'un tel programme : être
l'unique inspiratrice de jeunes scénaristes
et réalisateurs. Et de l'inspiration, il
y en eut : une fois l'appel lancé, Canal+
reçut quatre cent quatre-vingt-sept projets
!
Flash-back : une
matinée de mars, Nathalie Baye nous reçoit
sur le tournage de Dormir debout, de
Jean-Luc Perréard. C'est le dernier jour
du dernier tournage. Ambiance concentrée.
Même si elle est dirigée par un débutant,
l'actrice écoute, fait juste une ou deux
suggestions, comme elle le ferait avec un metteur
en scène confirmé. « Je
suis actrice. J'offre mon énergie comme
dans n'importe quel long métrage. Et je
ne suis pas là pour montrer de quoi je
suis capable, mais pour jouer dans l'intérêt
du film. »
Pendant la minipause déjeuner, elle explique
son adhésion au projet : « C'est
épatant de participer à révéler
de jeunes talents. Il faut avoir, je crois, une
certaine expérience pour être complètement
disponible à chaque fois, donner autant
à chaque réalisateur, être
comme neuve sur chaque tournage. »
Comment les cinq courts ont-ils été
retenus ? « Je n'ai
pas lu les cinq cents projets ! Trente ont
été présélectionnés
par Canal+, puis huit. Parmi ces huit derniers,
certains m'ont tout de suite emballée,
d'autres moins. J'ai demandé à relire
les trente, et j'en ai repêché un... »
Elle a eu du nez : celui qu'elle a « sauvé » - Je
voulais (vous) dire, de Romain Delange -,
très durassien, est le plus déroutant
des cinq.
Pour cette Collection, l'actrice, vraiment concernée,
a eu des exigences. « À
notre époque, en France, tous les réalisateurs
veulent être aussi auteurs, or il faut remettre
en lumière les scénaristes, qui
sont trop mal traités et mal payés.
J'ai insisté pour que les courts puissent
être scénarisés par une personne
et réalisés par une autre. Bye Bye,
par exemple, a été écrit
par une jeune scénariste qui sort de la
Femis et qui n'a, ô bonheur, aucune velléité
d'être réalisatrice ! »
Elle tenait aussi à respecter le circuit
officiel de sélection. « J'ai
reçu beaucoup de scénarios chez
moi ou par l'intermédiaire de mon agent.
Des projets d'un copain de copain... Je n'en ai
ouvert aucun ! Je voulais que le type qui
habite Sarreguemines ou Angoulême ait vraiment
sa chance. »
Quelque temps après : Nathalie
Baye, jambes fuselées sagement croisées
sur un pouf, est assise devant une poignée
de journalistes venus découvrir les cinq
films. C'est la première fois de sa carrière
qu'elle vient, ainsi, répondre à
chaud après une projection de presse. Il
faut qu'elle les aime, ses petits réalisateurs...
Dans ses réponses, elle n'en sacrifie aucun : un
compliment pour l'un, pour l'autre. « J'ai
accepté ce projet par curiosité,
par amour du cinéma et pour qu'ils soient
découverts à travers moi. Un jour,
quand ils seront devenus des Jacques Audiard,
je pourrai dire : tiens, il a fait son
premier court avec moi. Je l'ai vu naître.
C'est chouette... » On
lui demande si Je voulais (vous) dire
ne l'a pas menée plus loin qu'elle ne l'avait
imaginé. Un sourire rêveur : « Oui,
je suis un peu borderline... »
Elle n'en dira pas plus, mais elle sait sûrement
que c'est avec ce court repêché qu'elle
se montre sous un jour nouveau.
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