Nathalie Baye en couverture du magazine Version Fémina en octobre 2006  

Article paru dans VERSION FÉMINA, le 7 octobre 2006


Nathalie Baye.
À l'heure de son retour au théâtre, elle est aussi l'héroïne de la Californie, le premier film de Jacques Fieschi. Charmante, intelligente et sexy, l'actrice fait l'unanimité.

Propos recueillis par Clara Géliot.

Version Fémina : Dans la Californie, vous incarnez Maguy. En quoi vous a-t-elle séduite ?
Nathalie Baye : C'est une femme qui tente de se persuader que, malgré les années, sa vie n'a pas changé. J'ai été touchée par sa drôlerie, sa mauvaise foi, son angoisse. Maguy est à la fois enfantine et vieillissante, généreuse et égoïste. Elle est tout et son contraire. Pour une actrice, c'est formidable à interpréter.

Version Fémina : Dans sa villa, une cour gravite autour d'elle. Avez-vous déjà connu cela ?
Nathalie Baye : Non. Maguy fait partie de ces gens qui ont une telle peur de la solitude qu'ils s'entourent en permanence d'animateurs et de bruit pour se sentir vivants. Moi, j'ai besoin d'être seule pour me retrouver et me reposer entre deux projets.

Version Fémina : Cette femme riche s'ennuie. Le succès ou l'argent isolent-ils fatalement ?
Nathalie Baye : C'est certain. J'ai beau avoir des amis très chers avec lesquels j'ai des rapports vrais, j'ai parfois entendu dire : « On voulait t'appeler, mais on n'a pas osé car tu devais être très occupée. » Je dis toujours que trop d'argent rend bête, la célébrité isole et le pouvoir rend fou. Optimiste, n'est-ce pas ?

Version Fémina : Ludivine Sagnier incarne votre fille. Les scènes avec elle étaient-elles émouvantes à jouer pour la mère que vous êtes ?
Nathalie Baye : J'aime énormément cette actrice et je trouve qu'elle a fait, sur ce film, un travail formidable. Mais quand je joue, je n'établis plus de rapprochement avec ma vie. Penser à des choses très personnelles pour trouver une émotion est épuisant, insupportable. Heureusement, j'ai dépassé cela : si le dialogue est correctement écrit et la scène habilement construite, le jeu vient naturellement.

Version Fémina : est-ce difficile de quitter vos personnages ?
Nathalie Baye : Je ne quitte pas complètement ceux que j'ai aimés. Ils m'accompagnent. J'ai l'impresion d'avoir eu plusieurs vies, c'est génial !

Version Fémina : Vous serez, le 1er novembre, à l'affiche du film de Guillaume Canet Ne le dis à personne. Est-ce fatigant d'enchaîner les tournages ?
Nathalie Baye : Je n'ai que quelques scènes dans le film de Guillaume, et j'ai accepté ce petit rôle par amitié pour lui. Mais vous savez, ce n' est jamais fatigant de faire ce que l'on aime.

Version Fémina : Qu'est-ce qui vous fait vibrer dans votre métier ?
Nathalie Baye : Ce sont les rencontres ; avec un metteur en scène, un auteur, des acteurs, un univers, une région... À chaque fois, c'est un nouveau voyage.

Version Fémina : Vous êtes resplendissante. Vous sentez-vous mieux aujourd'hui qu'à vingt ans ?
Nathalie Baye : Certainement. On dit que vingt ans est le plus bel âge... je ne suis pas d'accord. C'est un cap assez douloureux : on n'est plus un enfant ni un adolescent, mais un adulte fragile, encore encombré de tas de choses inutiles ; 30 ans, 40 ans, c'est génial. Et maintenant, je trouve ça très bien aussi.

Version Fémina : Vous dites ne pas vous intéresser à vous...
Nathalie Baye : C'est vrai que j'aime l'idée de m'oublier. S'observer et toujours chercher à s'aimer m'ennuie profondément.

Version Fémina : Vous avez consacré dix-neuf ans de votre vie à l'éducation de votre fille, Laura Smet...
Nathalie Baye : J'ai toujours fait passer ma vie privée avant mon travail. Tant que Laura était petite, je n'ai jamais accepté de tournages qui m'en éloignaient. Mais de toute façon, une longue carrière est constituée de différentes périodes : celles où les propositions sont rares et où vous pensez que tout va s'arrêter, et celles où on multiplie les projets.

Version Fémina : Aimeriez-vous tourner avec elle ?
Nathalie Baye : Si cela se construit autour d'un projet intéressant, j'en serais heureuse. Mais l'idée d'utiliser la mère et la fille pour un coup publicitaire ne m'intéresse pas. Surtout pour Laura, car je voudrais qu'elle puisse s'accomplir par elle-même.

Version Fémina : Mettez-vous en garde votre fille contre les pièges de la célébrité ?
Nathalie Baye : Je lui dis de faire attention à une certaine presse qui peut être très dangereuse. Mais après, c'est à elle d'être vigilante.

Version Fémina : Vous remontez sur les planches après dix ans de cinéma. Avez-vous le trac ?
Nathalie Baye : Bien sûr. Mais ce n'est pas une maladie, le trac. C'est un moteur, une manière d'être dynamisé. Si le cinéma m'a beaucoup gâtée, je voulais remonter sur scène. Zouc par Zouc, le texte fulgurant d'Hevé Guibert, m'a énormément touchée. Et j'avais très envie de travailler avec Gilles Cohen, le metteur en scène.

Version Fémina : Vous avez retrouvé Gérard Depardieu dans Michou d'Auber, de Thomas Gilou...
Nathalie Baye : J'ai beaucoup joué avec Depardieu et, comme à chaque fois, cela s'est très bien déroulé. Mais le film ne sortira qu'en février 2007, c'est un peu tôt pour en parler.

Version Fémina : Inutile donc de vous interroger sur vos autres projets : trois films dont l'adaptation de Cliente, le livre de Josiane Balasko...
Nathalie Baye : Oh oui, on risquerait d'avoir la migraine ! [Rires.] Mais vous reviendrez me voir et, promis, je vous raconterai.

 

SON CARNET CINÉMA :

Le film qui vous fait rire à chaque fois ?
Avanti !, de Billy Wilder.

Celui qui ne cesse de vous faire pleurer ?
Comme un torrent, de Vincente Minelli.

Le couple de cinéma qui vous fait rêver ?
Richard Burton et Elizabeth Tayler.

La réplique de La Californie que vous préférez ?
Quand Ludivine Sagnier me dit : « On pourrait aller à la messe de minuit », je lui réponds : « Oui, c'est à quelle heure ? »

Le cinéaste pour lequel vous acceptez de tourner les yeux fermés ?
Xavier Beauvois.

Le partenaire dont vous rêvez ?
Lassie.

Le rôle qu'on n'a jamais osé vous proposer ?
Le mien.

La musique de film que vous adorez ?
Celle de La nuit américaine, composée par Georges Delerue.